La télévision suisse a-t-elle été «lamentable» dans sa couverture des élections ? C’est ce que pense le conseiller fédéral Pascal Couchepin.
Cela mérite au moins le débat. Mais non. La réponse aux critiques est simple: motus et bouche cousue. Les journalistes de la SSR peuvent poser tous les jours - et à raison - des questions impertinentes aux acteurs politiques. Mais lorsque leur maison est en cause, ils ferment les volets.
Et pourtant, c’est la noce à Thomas. Les dirigeants des quatre partis gouvernementaux ont couvert la SSR de reproches. Ils visent d’abord la généreuse augmentation que se sont octroyés les membres de son conseil d’administration de la grande. Péripétie: les sommes en question ne sont pas astronomiques. Mais cette maladresse témoigne de l’«autisme» que dénonce le même Couchepin. Rien n’a été retenu de la mauvaise humeur du public devant les hausses de la redevance, pas plus que celle des collaborateurs de la base qui s’inquiètent de voir les moyens considérables qui vont à l’administration centrale, à la cascade de chefs et sous-chefs alors qu’ils doivent se serrer la ceinture au niveau du programme.
Mais il y a plus préoccupant. Les patrons des télévisions alémanique et romande n’ont qu’un souci en tête: les taux d’écoute. Ils gèrent les chaînes publiques comme si elles étaient privées.
Personne ne souhaite que le petit écran devienne barbant. Mais doit-il vraiment n’avoir comme finalité que l’audience maximale à toute heure ? Il n’est même pas sûr que le calcul soit bon. En France, TF1 commence de lasser les publicitaires, fatigués de payer le gros prix pour un public hétérogène. En Allemagne, les canaux spécialisés voient leurs recettes augmenter au détriment des grands shows. La curiosité populaire est plus diversifiée que ne l’imaginent nos stratèges médiatiques.
Dans la course aveugle aux scores, la politique à la télé ne peut être que spectacle. En Suisse comme ailleurs. La vie publique se réduit ainsi à des coups de gueule, à des émotions, à des combats de coqs. L’exemple de l’émission «Infrarouge» est parlant: on y attend des stars qui se volent dans les plumes et des invités annexes qui se contentent d’intervenir brièvement, talonnés par des animateurs qui veulent que «cela chauffe». Inutile de dire qu’à ce jeu, les marchands de slogans ont la part belle.
Cette bipolarisation du débat lui enlève toute subtilité et toute profondeur. Lorsque la télé se contente de faire mousser le match politique, elle étouffe la réflexion. Elle pourrait compenser ce mal consubstantiel du genre en ouvrant des espaces plus ouverts, plus nuancés, plus approfondis. Avec des intervenants qui ne font pas leur boniment mais tentent de comprendre, d’analyser. Sur la durée. Chez nous, elle ne le fait pas. Ou trop peu. Elle offre de bons magazines mais n’a pas su ouvrir un forum fécond.
Est-ce à dire que la Suisse aurait une allergie au débat intellectuel ? Pas du tout. Les journaux qui se donnent la peine de nourrir des pages d’opinions constatent que leurs lecteurs en sont friands. La TV, elle, se prend trop souvent pour un cirque qui se contente de faire tourner les dompteurs de politiciens, les acrobates du verbe et les clowns du people.
A ce dérapage généralisé - encore une fois: ce n’est guère mieux chez nos voisins ! - la SSR ajoute une funeste manie: celle des sondages en rafales qu’elle commande et paie elle-même. Truc facile et peu significatif, trop prisé aussi dans la presse écrite, ils vibrionnent sur les humeurs du moment sans tenir compte des subtilités du système électoral, sans éclairer les phénomènes de fond. En France, leur profusion a suscité un débat: on y a relevé leurs pièges. En Suisse, rien. Ce n’est pas un sujet puisqu’il a trait à la SSR et que la SSR ne se remet pas en question.
L’approche «marketing» en vogue dans les états-majors de cette grande maison a d’autres effets pervers. La télé est de moins en moins regardante quant à la publicité clandestine. On a eu droit à un beau festival de réclames avec la course d’Alinghi, si généreusement retransmise. On vient d’en avoir un autre avec les logos qui se glissent jusque sur les atouts charmants de Miss Suisse. Toutes ces heures d’antenne avaient-elles pour but de plaire aux téléspectateurs ou aux annonceurs ? Quand un service public est à ce point obsédé par sa stratégie commerciale, le moment arrive où il faut choisir. Soit privatiser carrément la boutique. Soit l’amener à plus d’exigence.
Bravo M. Pilet. Votre critique de TSR et de la SSR est excellente et je n'hésiterai pas à recommander leur privatisation. Vu leur façon de traiter l'information, ils ne méritent pas la cédibilité que leur confère le statut de service public.
Cependant, SVP, continuez par votre autocritique (ou celle de l'Hebdo).
Rédigé par : dan | 28 octobre 2007 à 12h52
Qu'on puisse avoir envie d'un chef, comme Guisan ou Blocher, ça je peux le comprendre. Mais qu'on veuille tout miser là dessus pour ne pas tomber dans la déchéance européenne, là je trouve qu'on inverse le sens de la réalité et qu'on s'enfonce dans l'obscurantisme le plus désastreux. Je préfère encore regarder les émissions sur la TSR et lire l'Hebdo.
Qu'en plus "l'intello" vienne encore dire que l'Europe c'est une affaire de soixant'huitards alors que les problèmes traités concernent d'abord l'économie, c'est un mensonge supplémentaire.
Rédigé par : Carmen | 24 octobre 2007 à 17h00
A noter que l'Hebdo, non content de livrer de faux sondages pré-electoraux, va jusqu'à publier les insultes du "Monde" et de "Libération" dans son zapping médiatique, disponible sur la plateforme des blogs.
La rédaction de l'Hebdo aurait voulu que la Suisse vote à gauche, la Suisse n'a pas obéi alors l'Hebdo insulte le peuple.
Bra-vo ! Quelle belle démonstration ! On s'en souviendra !
Rédigé par : freddy | 24 octobre 2007 à 16h16
De toute façon, on peut dire ce qu'on veut de l'attitude des médias: même s'ils avaient traité la campagne autrement, Blocher et son parti auraient été plébiscités.
C'est un raz de marée qui vient des profondeurs et rejette le soixante huitardisme gnan gnan donneur de leçon et conformiste, dont, M. Pilet vous êtes l'incarnation. C'est le rejet aussi de l'européisme obtus des pseudos élites médiatiques, et c'est la colère, légitime, contre le reniement de la Suisse par les mêmes pseudos élites.
C'est la démocratie qui a parlé. Enfin!
Trop, c'est trop. La Suisse veut vivre indépendante et échapper au naufrage évident de l'Union Européenne, dans laquelle les pays avoisinnants sont englués et dont ils crèvent.
Il n'y a aucun "culte du chef" mais Blocher, c'est vrai, est secrètement adulé, un peu comme l'était le général Guisan en son temps, et pour les mêmes raisons: parce qu'il est le symbole de l'indépendance de notre pays.
Sans Blocher la Suisse ne serait plus un pays indépendant et elle se trouverait dans la même situation pitoyable que la France, l'Italie, l'Allemagne, l'Autriche: engluée dans les sables mouvants de l'Europe.
L'Europe aujourd'hui est synonyme de chômage de masse, marasme économique, mort des PME déficits abissaux, soumission à l'impérialisme américain et ses projets de guerres picchrocolines, hyper fiscalité et au bout du compte désespoir absolu pour les peuples qui sont emprisonnés dans ce machin déficient.
Plus la classe politique continuera de s'attaquer à Blocher, et plus l'UDC montera et plus les autres partis baisseront. C'est comme si un parti politique avait voulu insulter le général Guisan il aurait été balayé.
D'autre part on oublie toujours, et surtout dans ce blog, l'existence d'un référendum latent antieuropéen qui est là en permanence comme une toile de fond de la vie politique suisse.
Les politiciens de l'ex establishment, aujourd'hui balayé, PDC, PRD et PS, ont tellement envie de pouvoir promener leurs nullités à Bruxelles, qu'ils refusent de s'incliner de bonne foi devant la volonté du peuple de rester en dehors de ce machin désastreux.
Tant que ces ânes persisteront dans cette atitude suicidaire, leurs partis baisseront ou stagneront et l'UDC progressera. Si ces partis renoncaient une fois pour toute à l'Europe, ils retrouveraient probablement une bonne partie de leur électorat naturel qui les a quittés pour l'UDC.
Autre aspect: la baisse du PS. On peut y trouver toutes sortes d'explications. Mais il y en a une que je n'ai pas entendue dans les commentaires. C'est que pour la première fois les socialistes ne sont plus l'objet des compaisances et connivences de la pseudo droite bobo. Maintenant il y a un parti populaire qui combat le socialisme pour ce qu'il est: une mauvaise chose.
Et le résultat de ce week end démontre que quand on combat la gauche elle recule. Bien sur il y a aussi le succès des verts. mais les verts bénéficient de l'effet "réchauffement climatique". Ce n'est pas vraiment du à leur mérite. En plus les gains des verts sont moindres que les pertes du PS. Globalement la gauche recule.
Ce résultat est très réjouissant. Quel plaisir!
Et quel plaisir que ces salopards hypocrites qui avaient vraiment essayé d'éliminer M. Blocher avec des mensonges montés de toutes pièces (la soi disant "affaire Roschacher") se soient ramassés lamentablement et aient même apporté de l'eau au moulin de Blocher et son parti.
Le peuple a vu clair dans leur jeu et les a punis.
Serait-il trop demander à un commentateur comme Jacques Pilet de faire preuve d'un peu plus d'humilité et voir les réalités en face au lieu de ressasser les lieux communs d'une idéologie passée de mode.
Rédigé par : Intello | 24 octobre 2007 à 14h34
Celui qui parle constamment du loup ne doit pas être surpris de le voir arriver...
Rédigé par : JBS | 22 octobre 2007 à 20h38
Eh voilà.
Hystérie à l'Hebdo, frénésie dans tous les médias de Suisse, appels au boycot et aux manifestations anti-Blocher, et on termine avec un raz-de-marée en faveur de l'UDC.
La presse suisse est toujours aussi autiste et méprise toujours autant le peuple.
Les élections ne sont pas seulement un désaveu pour le PS. Elles démontrent aussi, clairement combien le rejet des médias par le peuple suisse.
Rédigé par : freddy | 22 octobre 2007 à 15h13
C'est vrai que le public en redemande, en pensant qu'enfin il y a là un sujet sérieux duquel s'intéresser, pour changer des émissions plus purement divertissantes, comme des films ou des compétitions sportives.
Et je tombe régulièrement dans le piège en pensant qu'il faut s'intéresser de ces phénomènes électoraux.
Le cocktail est toujours le même: les gagnants, les perdants, les sondages, etc.
C'est la grande messe au château, les gens s'y préparent à l'avance. Certains depuis 4 ans. Les journalistes, eux sont toujours là et font leur travail. Comme les banquiers qui votent à droite et les ouvriers qui votent à gauche, comme les étrangers qui ne votent pas.
Le problème c'est que qu'on se demande ce qu'il y a encore d'humain dans tout ça, c'est-à-dire de courageux et spontané, de créatif, de non programmé.
Rédigé par : Carmen | 21 octobre 2007 à 12h44